mercredi 27 mars 2013

L'oiseau-livre: une nouvelle fable sur la lecture que les enfants savent se réappropier




L'oiseau-lire

Belin. Paris, 2009

Texte: Joel Franz ROSELL

Ilustrations: Vanessa HIE

Traduction: Sylvia Gehlert


"L'oiseau-lire" est une fable nouvelle autour de la lecture. C'est aussi une parabole de ce rêve de tout auteur de voir ses livres arriver aux lecteurs.
Il s'agit d'un livre décide de quitter la bibliothèque où il ne rencontre pas assez de lecteurs. Il apprend à voler, puis à parler pour finir conteur sur la place en face de la bibliothèque. L'édition espagnole a été récompensée à Cuba comme l'un de meilleurs livres pour la jeunesse de l'année.


A la bibliothèque municipale, un livre de contes s'ennuie. Jamais personne ne vient feuilleter ses pages que la poussière alourdit. Les enfants n'empruntent que des livres de sciences, d'Histoire ou encore des romans vus à la télé...




Un jour, le livre de notre histoire sent que le désir d'être lu est trop grand. Il bouge ses pages, il s'en sert comme des ailes qui lui permettent de quitter son étagère et aller à la conquête des lecteurs...








Contrairement à ce qui est dit dans le numéro de mars 2010 de la revue Citrouille, mon sixième livre français n'a jamais été un roman et la libraire qui imagine avoir un rôle décisif dans la publication de ce livre n'en a eu aucun. Le texte de cet album est la traduction du livre publié originalement en Espagne (El pájaro libro. Ediciones SM, 2002) sour la forme d' "album de poche" qui est fréquente chez les grands éditeurs espagnols.


version originale: "El pájaro libro". Ediciones SM, 2002. Illustrations: Ajubel.
Prix national d'illustration. Espagne, 2003

Cette première édition magnifiquement illustrée, a procuré à mon compatriote Ajubel le Prix national d'illustration d'Espagne. Illustrateur émérite, Ajubel collectionne les prix en humour, graphisme, illustration. Son plus récent laurier est le Bologna Ragazzi Award pour son roman graphique Robinson Crusoé (publié en France par Plume de carotte). Ce prix est bien probablement le plus important prix d'illustration de livres pour la jeunesse au monde!


En fait, la première apparition du livre devenu oiseau-conteur, héros de cette histoire, date de 1982. Il figure comme personnage secondaire dans une tout autre histoire, intitulé "Teresa", que j'ai publié alors dans un journal de Santiago de Cuba et que l'on retrouve dans mon recueil "Sopa de sol" (Buenos Aires. Tinta Fresca, 2011).

Pour une version illustré en couleurs demeurée inédite j'avais conçu cette illustration:
illustration de l'auteur, inédite

L'Oseau-lire dans la médiathèque de Montélimar
Même si L'oiseau-lire c'est un livre pour des lecteurs de toutes âges, les petits reçoivent très bien le message : ils sont sensibles à l’aventure de ce livre qui se rebelle contre une vie passive dans la bibliothèque et qui apprend à voler et à parler pour, perché sur un arbre de la place publique, devenir conteur


















Les enfants de CE1 de l’école primaire de St Martin sur Ocre http://ec-saint-martin-sur-ocre.tice.ac-orleans-tours.fr/eva/ont su récréer mon livre avec des très jolis dessins.

En voici un petit choix:
Même l'illustratrice qui co-signe l'album, Vanessa Hïé, n'a pas imaginé une bibliothèque aussi coloriée!












dans mon histoire, les dictionnaires et autres livres savants réagissent très mal lorsque mon héros, futur Oiseau-lire, se met a voler









Est-ce moi?

un petit charmant salon du livre pour la jeunesse (Giennois)


Du 22 au 24 de mars j’ai été l’invité du 28ème Salon giennois du livre pour la jeunesse. Le pays giennois s’étend sur les bords de la Loire et si le siège du Salon est le charmant château de Saint Brisson, les auteurs et illustrateurs participants avons rencontré nos lecteurs dans des écoles et collèges de plusieurs des localités dont Gien est le chef-lieu.





J’ai passé toute la journée de vendredi en compagnie des bambins qui avaient lu mes albums «Petit Chat Noir a peur du soir » (Bayard), « L’oiseau-lire » (Belin) et « La chanson du château de sable » (Ibis Rouge) le seul de mes sept titres français dont je suis auteur et illustrateur. Il y avait également un collège dans mon programme, mais là il s’agissait de l’improbable rencontre entre un écrivain et des jeunes qui ne l’avaient pas lu !





Me visites dans les écoles maternelles (Petite et Grande section, CM1) avaient été parfaitement préparés et j’ai été reçu avec des exemplaires de mes livres en main par des bambins absolument adorables.

J'ai raconté les histoires qu'ils avaient déjà entendu, mais surtout quelques-unes qu'ils ne connaissaient pas.

Les plus grands (CM1) ont adoré l'histoire de mon premier héros, Super Pec, que j'ai au même à dessiner sur leurs mains!
 

Mais le collège Mermoz n’a pas très bien péparré la rencontre. On n'a pas estimé nécessaire d'acheter un seul de mes livres, même pas pour le CDI ou la rencontré s’est déroulé, por les faire lire (ou le montrer au moins) aux élèves. Les élèves, très attentifs, m’ont posé les questions habituelles : « Pourquoi avez-vous choisi ce métier ? », « Combien de livres avez-vous publiés ? » « Quel est votre livre préféré ? »… Des questions qu’il auraient pu poser à n’importe quel autre auteur, et même à un boulanger ou footballeur (en ne changeant que le mot « livre » par « match » ou « type de pâte » .

Mme. le professeur d’espagnol a pourtant bien compris le parti qu’elle pouvait tirer de la présence d’un auteur hispanophone dans sa classe, mais n’a pas pensé à télécharger un des textes disponibles dans mes sites et encore moins à s’enquérir de la possibilité d’obtenir un exemplaire de mes livres en espagnol (pas moins de 25, appropriés pour toutes les compétences lectrices et linguistiques).

A quoi bon rencontrer un auteur que l’on n’a pas lu et que l’on n’a pas l’intention d’approcher après la rencontre ? Malgré le travail de sensibilisation qui se fait depuis des années sur tout le territoire français, il y a encore des enseignants, des bibliothécaires et des responsables scolaires qui confondent le moyen (la visite de l’auteur) avec la fin : la promotion de la lecture. Pour cela il faut qu’il y ait au moins un triste exemplaire d’au moins l’une des œuvres de l’auteur dans le CDI (chose qui ne doit pas peser lourdement sur le budget de l’établissement).


J’ai quitté le collège Mermoz avec un goût amer. Mais deux jour plus tard, une fois fini le Salon, lorsque j’abandonnais le Château de St Brisson sans avoir vu que des rares adolescents (aucun dudit collège) s’approcher de mes livres « La légende de Taïta Osongo » et « Cuba destination trésor », je me sentais autorisé à croire que si les jeunes ne lisent pas plus ce n’est pas uniquement la faute de l’Internet, le portable et autres coupables habituellement signalés.





Le Salon du livre pour la jeunesse du Giennois est porté avec conviction par une équipe de bénévoles qui dirige avec dévouement Anne Vescovi. https://sites.google.com/site/salondulivre giennois










Après les journées de visites scolaires par une douzaine d’auteurs, illustrateurs et conteurs (pour certains commencés dès jeudi), nous nous sommes tous rencontrés au château de St Brisson, qui abritait non seulement les séances de signatures, mais des ateliers, des concerts, des expos et un spectacle de la conteuse cubaine Mercedes Alfonso, toute fraîchement arrivée de Cuba.



Nous n’avons pas chômé les auteurs jeunesse réunis au deuxième étage (des livres pour adultes étant proposés au premier et les ateliers au rez-de-chaussée). J’ai presque épuisé la réserve d’exemplaires de « Petit Chat Noir a peur du soir » et de « La chanson du château de sable » (j’offre en guise de dédicace un dessin à l’aquarelle que je ne répète jamais) et même quelques-uns de mes livres en espagnol ont trouvé acquéreur (tout particulièrement des exemplaires de la série Gatito (Kalandraka), le jumeau espagnol de ce « Petit Chat Noir… » qui avait su ravir les bambins rencontrés la veille.


Après un week-end intense, je suis revenu à la capitale… ou m’attendait le lendemain le Salon du livre de Paris (mais, ça c’est une autre histoire).

mercredi 31 octobre 2012

"Petit Chat Noir a peur du soir" fait des petits espagnols, tout en menant sa vie en France


Petit Chat Noir a peur du soir

Auteur : Joel Franz Rosell

Illustrateur : Beppe Giacobbe

Editeur : Bayard Jeunesse (Paris, mars 2011)

ISBN : . ISBN: 978-2-7470-3485-2

Collection : Les belles histoires des tout-petits (2-4 ans, et plus)

Résumé :

Petit chat noir refuse de s'aventurer dans la nuit, jusqu'au jour où sa curiosité le     pousse vers la forêt. Il y découvre un univers riche, au cœur duquel ses yeux de chat sont un atout.

Sujets : peur, nuit, chat, livre d’images

 

Petit Chat Noir a peur du soir est mon septième livre français. Joliment édité dans la collection « Les belles histoires des tout-petits » (Bayard. Paris, 2011), l’objet est particulièrement adapté aux mains des enfants de 2 à 4 ans. Les superbes illustrations de Beppe Giacobbe évoquent l’atmosphère nocturne du récit et l’intonation poétique d’une histoire assez simple : la découverte de la nuit et de soi par un petit chat qui craint se perdre dans l’obscurité à cause de la parfaite noirceur de sa toison. 

 

Première version : revue Tralalire n° 90.  Paris, mai 2008

Publiée d’abord dans la revue Tralalire (Bayard presse, mai 2008) cette histoire a été cautionné  par les enfants et a même fait l’objet d’une traduction en anglais.


       Version anglaise. Revue Story Box, n° 137.
Peterbourough (Grande Bretagne), 2009
 
Je suis le heureux auteur de "Petit Chat Noir a peur du soir". Recherchant une image scannée de la couverture de mon tout récent dernier livre, je découvre ce commentaire enthousiaste. Il me fait chaud au cœur. Je ne suis pas un auteur débutant (une vingtaine de livres dans ma langue maternelle l’espagnol, car je suis Cubain d’origine, et sept en français), mais les bonnes critiques des livres pour la jeunesse sont rares et encore plus lorsque cuex-ci  s’adressent aux tout petits. Je suis d’accord sur le fait que la couverture n’est pas très « parlante » et sur le rendu des illustrations, plus réussi dans la version revue. Mais les enfants ont une meilleure qualité de vue que nous autres, adultes, et probablement ils ne se plaindront pas d’un si joli livre. Si vous avez aimé celui-ci, vous devriez apprécier également mon livre précédent, « L’Oiseau-lire » (Belin, 2009).
 
Au salon du livre de Firminy, mars 2012

 
Les lectures de Bauchette                                        mardi 22 février 2011

Petit chat noir a peur du soir car noir de la pointe des oreilles au dessous des pattes, il craint que dans le noir on ne le retrouve pas s'il se perd. Un soir, il ose s'aventurer à la suite de ses frères et soeurs, pour enfin "connaître la forêt et les hiboux et les lucioles". Tant que la lune éclaire la forêt sombre, tout va bien, mais quand la lune se cache derrière les nuages et qu'il fait nuit noire, petit chat reste terrifié, les yeux fermés. Ce qu'il ne sait pas encore, c'est qu'à côté de lui il y a un petit animal (un petit lapin perdu) qui a encore plus peur que lui et qu'il lui suffit d'ouvrir grand ses yeux pour voir dans le noir, comme tous les autres chats !
Quelle histoire, parfaitement menée et joliment illustrée! La couverture ne me disait rien qui vaille au départ mais ce texte, franchement, est une vraie réussite. Il est vrai que j'ai toujours été fascinée par cette faculté des chats à pouvoir voir et être vu dans le noir, comme si de petits phares se dissimulaient derrière leurs yeux...  Mais ce texte recouvre encore plein d'autres choses : les thèmes de la peur et de la nuit, la tendresse d'une rencontre entre deux animaux, la prise de conscience de ses capacités propres et le plaisir ensuite d'en jouir... Une structure narrative simple pour s'adapter à l'écoute des plus petits  mais une histoire d'une très grande richesse avec un vrai talent d'écriture.

Ce beau texte est  illustré par Beppe Giacobbe, un artiste italien édité aux Etats-Unis, en Italie et en France. Je trouve qu'une vraie personnalité se dégage des illustrations de cet album  même si au vu du portfolio de l'artiste, elles ne sont pas représentatives de son style. Ce travail sur le noir, le contraste, les pleins et les vides est vraiment intéressant et d'un très bel effet visuel (que ne rendent cependant pas totalement les pages plastifiées de cet album. Le livre résiste certes aux petits mains un peu brutales mais ce brillant est assez désagréable à l'oeil, il faut bien l'avouer, et cette illustration aurait peut-être mérité une impression sur un autre support, plus mat). Et il y a dans ce dessin du Petit Chat Noir une tendresse infinie... qui nous fait fondre.

Un bonheur de lecture, donc, accessible aux enfants dès 2 ans.

 
 

La première classe de CP avec laquelle j’ai partagé mon Petit Chat Noir

Très satisfaite du bon accueil de Petit Chat Noir a peur du soir, la revue Tralalire (Bayard) m’a demandé des nouvelles histoires autour du personnage. Or, je n’ai pas réussi à les convaincre, alors que mon éditeur espagnol Kalandraka en était à tel point ravi que la série Gatito (Petit Chat) est déjà à son deuxième titre. Ce n’est que récemment que je me suis rendu compte qu’il y avait une différence dans le traitement du héros : dans mes nouvelles histoires il n’était plus un chat légèrement humanisé, mais un chat tout à fait anthropomorphe. Ça se remarque tout de suite lorsque l’on voit les très belles illustrations de Constanze von Kitzing pour la série Gatito.

 
Gatito y el balón (Petit Chat et le ballon)

Kalandraka. Sevilla, mai 2012

Disponible en espagnol, anglais, basque, catalan,

italien et portugais.

 
Gatito y la nieve (Petit Chat et la neige)
Kalandraka, novembre 2012
Disponible en espagnol, anglais, basque,
catalan et portugais.

mardi 16 octobre 2012

Tintin se mêle de la question Rom

Hergé a été accusé de tous les maux : d’antisémitisme (ici et là), d’opinions colonialistes (Tintin au Congo), de positions filo-fascistes (pour sa collaboration –et le mot tombe à pic- avec le journal Le Soir pendant l’occupation allemande de la Belgique)...

On oublie par contre souligner ses prises de position progressistes ou tout au moins humanistes lorsqu’il condamne le capitalisme prédateur envers les « peaux-rouges » (Tintin en Amérique), le militarisme japonais face aux Chinois (Le lotus bleu), ou la tentative d’anschluss de la Syldavie par le nazi-fasciste Müstler (Le sceptre d’Ottokar).

La polémique que soulève de nos jours la politique du Ministère français de l’intérieur envers les Rom, nous renvoie à l’exemplaire représentation de la question qui offre Hergé dans son album éponyme Les bijoux de la Castafiore (1963!).   

Il n’y a que Tintin pour ne jamais tomber dans le stéréotype. Tous les autres personnages de l’album, à degrés divers y sont coupables : des fois ils sont indifférents comme la Castafiore,  ou soupçonneux comme Nestor, mais ils peuvent aussi se montrer ouvertement prédisposés contre les Roms.

Au premier abord, les héros de la série, Tintin et Haddock se limitent à constater le déplorable sort des « bohémiens ».



Nonobstant, le capitaine Haddock ne peut pas s’empêcher d’exprimer des préjugés lorsqu’il suppose que les Gens du voyage ne daignent pas camper au milieu des ordures.



Son bon cœur le fait se raviser et il offre généreusement ce que la mairie a nié aux caravaniers : un endroit approprié pour camper.

La même évolution n’est pas à attendre des autres. Le « bon Nestor » est convaincu que les Rom sont nuisibles.

 
Ce n’est qu’à peine mieux de la part d’un autre grand cœur qui, en plus, se trouve être le représentant de la science dans les Aventures de Tintin, le professeur Tournesol.


La question s’aggrave chez les représentants de l’Etat. Certes les Dupond & Dupont sont des brillants exemples du européen moyen, mais ils sont, ne l’oublions pas des policiers professionnels. Ils n’auront la moindre hésitation quant à la culpabilité des Romanichels dans l’affaire du vol des bijoux de la Castafiore. L’absence de preuves n’est pour eux qu’un détail.













Leur prédisposition est parfaitement partagée par l’autre représentant de l’Etat qui intervient dans l’album, le chef du poste de gendarmerie locale, autrement dit le représentant du préfet qui, on s’en doute, est le même qui n’a laissé aux caravaniers autre choix que s’installer dans la décharge publique.









Que le digne fonctionnaire soit traité de perroquet par le capitaine Haddock, n’est pas la conséquence d’un simple gag. Ce serait méconnaître la capacité à multiplier les messages qui est trait caractéristique du style d’Hergé. Ligne claire n’a jamais été synonyme de simplisme et encore moins d’absence de réflexion sur le monde.


« Les bijoux de la Castafiore » raconte l’histoire d’un vol qui n’eut jamais lieu. L’affaire des Rom n’est-il pas, lui aussi, un rideau de fumée ? (en italien, les bons amateurs de BD le savent, phylactère se dit « fumetti »).

lundi 23 juillet 2012

Voyage Lillois avec un roman sur l'esclavage






A mon arrivée à la gare Lille Flandres le 17 février 2012, j’étais attendu par Mme. Christine Oakil, l’enseignant partenaire pour ma deuxième participation au projet « A l’école des écrivains ». 

A peine installés dans sa petite voiture, elle m’a confié que ses élèves étaient très impressionnés par mon parcours international : j’ai quitté mon Cuba natal, à 34 ans, pour le Brésil puis le Danemark et la France, où je suis resté cinq ans avant de repartir en Argentine. Depuis mon retour, quatre ans et demi plus tard, j’ai fait des séjours plus ou moins longs en Allemagne, Espagne, Grèce, Autriche, Brésil...

Tout cela doit paraître extraordinaire aux enfants d’un quartier populaire du nord de la France, dont l’une de premières conséquences d’un budget familial restreint est l’immobilité.

Mme. Ouakil m’expliqua que l’année précédente, le collège avait organisé une excursion à la côte, distante de moins de 80 kilomètres, et pourtant pour une majorité des élèves c’était la première fois qu’ils voyaient la mer. Et même, a-t-elle ajouté : « La plupart de mes élèves ne viennent que rarement au centre ville !»

Ceci en parlant de Lille, tout en étant appelée « la métropole du nord », n’est pourtant pas une très grande ville.

Ma première rencontre avec les élèves de la classe 6e 3 du collège Paul Verlaine avait été conçue sous la forme d’une « conférence de presse ». Ils venaient de lire mon roman La légende de Taïta Osongo et m’ont soumis les (prévisibles) questions sur l’ouvrage, sur mon métier d’écrivain et, sans surprise après ce que venait de me dire l’enseignante, sur mes nombreux voyages ainsi que sur mon pays d’origine, les raisons pour lesquelles je l’avais quitté et les circonstances de mon installation en France.
 La légende de Taïta Osongo. Ibis Rouge, 2004, mon roman sur l'esclavage

J’ai tout de suite décidé que le projet d’écriture que nous devions entreprendre serait une sorte de voyage pour nos auteurs en herbe.

Mme. Ouakil m’avait prévenu qu’il s’agissait d’une classe peu motivée et avec des résultats scolaires plutôt médiocres. J’ai donc insisté sur le long processus d’écriture de mon roman. Je leur ai montré un manuscrit couvert de ratures daté 1992 à Copenhague. Cette mouture de mon roman était encore bien loin de la version définitive (Paris, 1999) et pourtant il avait déjà pas mal évolué depuis l’original (Santiago de Cuba, 1984). Ils ont eu du mal à comprendre que, en dépit du fait d’avoir reçu un prix donnant droit à publication, je poursuive le travail sur cet ouvrage pendant quinze longues années.
les trois autres versions de "La légende...": Fondo de Cultura Ecoómica (espagnol, Mexique 2006), Capiro (espagnol, Cuba 2010), Ediçoes SM (portugais, Brésil 2007)

J’ai tout de suite perçu que ces enfants auraient du mal à libérer leur imagination. Ayant remarqué l’impact de mon histoire sur ces jeunes gens aux origines majoritairement extra hexagonaux et l’intérêt qu’ils portaient au destin de Taïta Osongo (un roi et sorcier africain qui devient esclave dans une colonie de la Caraïbe), j’ai proposé d’inventer une enfance à mon personnage. Le conte étant dans le programme de français, j’ai choisi, avec l’accord de Mme. Ouakil, d’inscrire dans ce genre les textes que les élèves allaient écrire.
Lors d'une rencontre avec des lecteurs de "La légende de Taïta Osongo" a Maripasoula, Guyane. Une partie d'entre eux étaient des descendants de esclaves marrons

La classe a été divisée en six petites équipes. Chacune a créé une histoire indépendante. Il en résulta un mélange parfois cocasse entre le cadre historique de mon roman et le monde dans lequel vivent ces jeunes Lillois. Parfois il fallut leur faire comprendre que les situations qu’ils avaient imaginées étaient impossibles pour un jeune africain du XVII ou XIX siècle. Tant dans la forme que dans le contenu, leurs récits laissaient souvent apparaître les traces d’une consommation culturelle dominée par des séries télé et autres films de mauvaise qualité.

Comme il était facile de prévoir, quelques élèves ont été incapables de produire quelque chose de cohérent, pour ne pas parler d’un texte abouti. De toute façon, est-ce le but d’un atelier d’écriture ne dépassant pas deux rencontres et demie, d’environ deux heures chacune, que de produire de vrais textes ? Il me semble que le programme « A l’école des écrivains » cherche surtout à éveiller l’intérêt pour le livre et la lecture auprès des enfants qui en majorité en sont dépourvus.
Avec d'autres lectrices de mon roman sur l'esclavage

A la fin de la troisième rencontre, la moitié des textes n’étaient pas totalement finis. Mme. Ouakil a promis de mes les envoyer pour une dernière mise à point et échange par e-mail, mais je ne rien reçu. Ceci arrive souvent : les enseignants participant aux projets d’animation semblent toujours dépassés par leur emploi du temps et le passage des écrivains dans leurs établissements est souvent perçu comme un « accident » rafraîchissant et certainement motivant, mais pas comme un moment marquant dans l’année scolaire. 

samedi 19 mai 2012

« Une escale caribéenne sans quitter le nord de la France : festival en Mayenne »


L’association Ti Woch a été représentée au Festival Lézard Nomade qui accomplit sa deuxième « Escale Caraïbe »  les 7-8 avril 2012 dans la ville de Mayenne (au centre du département du même nom).


Déjà en 2011, la fondatrice de l’association, la conteuse Suzy Ronel, s’était produit dans le populaire rassemblement culturel, mais cette année il y avait aussi Jacques Luder (illustrateur), Arnaud Alet et Serge Tamas (artistes musiciens), Max Diakok (danseur chorégraphe et chanteur) et le soussignant : Joel-Franz Rosell, auteur et illustrateur.


Ainsi étaient représentées la plus part des compétences artistiques qui compte l’association Ti Woch et aussi la diversité d’origine de ses membres (Guadeloupe, Martinique, Cuba, le très métissé département de la Seine-Saint Denis, La Réunion). Notre association est composée par des conteurs et autres « artisans des mots » et nous nous proposons promouvoir les cultures créoles. Nous le faisons à travers nos spectacles, livres, concerts et aussi à travers notre magazine pour enfants Ti-Woch, dont le deuxième numéro vient de sortir.

Au festival Lézard Nomade, Ti Woch a présenté deux très applaudis spectacles de contes (Suzy Ronel à la parole, Serge Tamas à la guitare et la percussion), un happening pictural avec Jacques Luder (et le public enthousiaste !) qui laissa deux magnifiques tableaux collectifs chacun de plus de 2 m de large.


Serge Tamas, Arnaud Alet et Max Diakok on proposé au public des approches diverses des cultures et langues créoles de la Caraïbe (dictons, devinettes, chansons...)



Dans l’espace dédicaces de livres pour enfant il y avait des livres signés par Suzy Ronel, Jacques Luder et Joel Franz Rosell. Nous avons présenté les n°s 1 et 2 de Ti-woch magazine et des CDs de contes de Suzy. J’y ai conté deux de mes livres. N’étant pas un véritable conteur, mais un auteur-illustrateur qui raconte ses histoires, je me sers d’une technique proche du kamishibai, forme de théâtre traditionnel japonaise dans laquelle on transmet l’histoire en lisant son texte, imprimé au des illustrations que le public regarde pendant que le « conteur » prononce les mots.


Le festival Lézard Nomade est une expérience culturelle remarquable par le niveau d’implication de la population dans sa réalisation. L’équipe, très efficace et sympathique, qui l’organise (le Kiosque) compte dans ses effectifs des professionnels et des bénévoles. C’est ainsi dans la plus part des associations qui organisent festivals culturelles et salons du livre partout en France. Mais au Lézard Nomade chaque visiteur semble s’intégrer immédiatement à l’équipe organisatrice. Par exemple, la déco aux couleurs caribéennes, a été en grande partie élaboré par les intégrants des ateliers d’art plastique de Mayenne, tout comme le flash mob qui mit un « chaud » point finale à chaque soirée du festival sut transformer en « danseurs de dimanche » l’assistance, les organisateurs et les intervenants.

Cuba, terre des débrouilles

  Une fois n'est pas coutume. Habituellement je parle de littérature jeunesse. C'est la spécialité que je cultive en tant qu'aut...